C’est une histoire navrante dans laquelle on peut voir que l’agitation verbale de Zébulon Ier vise à conserver le statu quo tout en donnant l’impression d’être un révolutionnaire
altermondialiste. Au commencement est le désir typiquement américain de devenir proprio comme signe visible de réussite sociale car les tenants (« locataires ») sont considérés
aux États-Unis comme du pipi de chat. C’est la version US du « si t’as pas une Rolex à 50 balais, t’as raté ta vie ». Ce désir est évidemment encouragé par les politicards de toute
obédience puisque pendant que le salarié paye les traites de son logement, il est tranquille : il aménage, il embellit, il ne fait pas grève, il participe à la vie sociale où il est reconnu
comme personne et non plus comme prolo. On comprend pourquoi Gnafron Ier voulait importer ce modèle en France, modèle qui en plus enrichit les banques par le biais du versement des intérêts de
l’emprunt et les municipalités via les taxes foncières. C’est pourquoi, du reste, on n’entend guère les « socialistes municipaux ».
Las, après la révolution libérale de Reagan/Thatcher, les salaires se sont mis à stagner et même souvent à reculer quand exprimés en dollars constants depuis 1970. Le revenu des Américains n’a
globalement augmenté que parce que le taux d’activité des femmes s’est accru et que les ménages ont eu alors un double salaire. C’est un effet induit et voulu de la mise en concurrence des
différents pays sur un marché mondialisé avec la libre circulation des capitaux : les pays les moins « coûteux » (frais de main d’œuvre, etc.) ont détruit les emplois industriels
des autres et exercé une pression à la baisse sur les rémunérations. Accéder à la propriété devenait chose impossible pour les petites gens. Eurêka : on a ouvert en grand les vannes du
crédit, notamment immobilier. En plus des crédits hypothécaires dits « primes » pour les emprunteurs aisés et solvables, les banques inventèrent les « subprimes »
pour les fauchés peu fiables. Pas de problème : en cas de défaillance de l’emprunteur, la banque ferait saisir le bien qui, ô miracle, aurait augmenté de valeur entre-temps. En effet, le
développement du crédit entraînait un boom immobilier et une inflation des prix des maisons et logements. Et ces plus-values immobilières attendues permettaient de souscrire des crédits
supplémentaires à la consommation de type « revolving » (cartes de crédit renouvelable à 20 % de taux d’intérêt que Tsarko admirait tant). Il se trouve que les
subprimes étaient à taux d’intérêt variable. Or, en 2005-2006, la FED augmenta son taux directeur afin de conserver et attirer des acheteurs de bons du Trésor US comblant les énormes
déficits budgétaires dus aux guerres d’Irak et d’Afghanistan. Patatras, les taux d’intérêt montèrent en flèche, ce qui empêcha les pauvres de payer leurs traites mensuelles. De plus, dans ces
prêts, on ne payait le capital emprunté que vers la fin et les premières années étaient à faible taux d’intérêt. Tout cela précipita les prolos dans la mouise.
Dès 2006, et surtout dès début 2007, les banquiers d’affaires virent que le marché immobilier se retournait et que les défaillances d’emprunteurs en subprimes se multipliaient. Eurêka et première
solution véreuse : titriser les titres d’hypothèques, c’est-à-dire en faire des paquets par milliers, en les transformant en un effet financier unique vendable sur le marché. Ce sont les
Assets Backed Securities (ABS) qui ont l’avantage, en étant vendables, de transférer les risques aux acheteurs et de pouvoir ainsi être sortis lors du bilan des banques (qui auraient été
obligées de passer des provisions pour pertes) et d’échapper aux obligations prudentielles (avoir 2 % des engagements de la banque en ressources propres et actifs). C’est le début de la finance
fantôme dite aussi « hors bilan ». Las, ces papiers risqués finirent par avoir du mal à trouver preneur. Les subprimes ne représentaient pourtant que 4 % du PIB (600 milliards de
dollars) contre une dette privée globale atteignant 190 % (près de 30 000 milliards). Pourquoi, alors, cet écroulement de la finance US ? C’est à cause de l’installation d’un risque
systémique introduit par icelle. La titrisation fait partie de cette complexité où une chatte ne reconnaîtrait pas ses petits.
Eurêka bis. Les banques inventèrent alors la Collaterized Debt Obligation (CDO). Vasistas ? C’est « un produit structuré », regroupant différents paquets d’ABS (ou autres
titrisés comme les MBS, Mortgage Backed Securities, paquets regroupant des créances sur les hypothèques primes, ou tout autre titre de regroupement de créances, par exemple sur les
crédits voiture ou sur les prêts pour études ou traitement médical lourd), hiérarchisés par niveau de risque ou découpés en tranches à taux d’intérêt différents, comme un millefeuille où la
tranche supérieure serait de la nougatine (les bons du Trésor US peu rentables mais sans risque) et l’inférieure, de la génoise (les subprimes). Quand il y a défaillance, ce sont les tranches du
bas qui écopent en premier ; ce sont celles qui rapportent le plus mais sont les plus osées et défaillantes en premier. C’est ce qui explique que les CDO s’écroulèrent car la génoise a
pourri tout le paquet comme une pomme véreuse dans un panier. Grâce aux subprimes, cependant, le CDO était un produit financier juteux sur lequel les banques européennes se précipitèrent aussi en
les intégrant dans des « SICAV dynamiques ». En France, les banques « universelles » (à la fois de dépôt et d’investissement ou d’affaires) en achetaient pour leur partie
affaires et celle-ci priait la partie dépôt de les fourguer aux petits épargnants. De façon générale, les banques souscrivaient des montagnes de CDO juteux. Las, les ABS plombèrent rapidement les
CDO. Et, parallèlement, les banques avaient mis leurs CDO dans des filiales sises dans des paradis fiscaux.
Eurêka ter, ce qui a accru encore le risque systémique. On inventa alors génialement le Credit Debt Swap (CDS, échange de titres de dettes). Vasistas ? C’est une assurance contre la
perte de valeur des titres : un acheteur de CDS paie une prime à un assureur (ce fut en général AIG, dont la faillite a été évitée car elle a été rachetée par le gouvernement US pour 185
milliards de dollars) ; en cas de perte, l’assureur la rembourse. Le CDS est merveilleux : vous pouvez (comme pour les ABS, CDO et tout autre titre ou comme pour tout objet de
spéculation) l’acheter à terme, à découvert ou « à nu ». C’est-à-dire sans dépôt de garantie ou avoir préalable existant. Auquel cas, en cas de perte, vous ne payez que la différence
entre l’engagement et la réalité : vous promettez de vendre 100 titres à 90 euros – sans les avoir – en espérant qu’ils vaudront 80 euros dans 3 mois ; s’ils en valent 100 vous devez
100 multiplié par 10 – 100 moins 90 – à l’acheteur soit 1 000. C’est donc une perte sur un avoir fictif (ou un gain si vous avez spéculé à la hausse) sans avoir réellement acheté puis vendu la
marchandise ou le titre ! On s’est rapidement retrouvé avec des CDO et des CDS au carré, au cube, etc.
Mais le CDS a une autre qualité : c’est comme si vous pouviez assurer la voiture de votre voisin en espérant un accident ; on peut spéculer sur ce que les autres ont. Par exemple, des
obligations de la dette grecque. Plus les CDS sont souscrits sur celle-ci, plus la confiance dans ladite dette diminue, plus sa valeur faiblit, plus les taux d’intérêt exigés pour la refinancer
sont élevés. Ce qui ruine la Grèce et qui procure d’énormes bénéfices aux spéculateurs (des banques ou Hedge Funds, évidemment) à la baisse des titres de dette grecs. Et comment fait-on
chez les spéculateurs pour acheter des CDS (ou des CDO ou des ABS) ? On emprunte au trésor US à 0,25 % ou à la BCE à 1 % (le fameux effet de levier de l’emprunt) ! Rappelons que Tsarko
avait fait prêter des sommes considérables aux banques françaises pour qu’elles maintiennent et développent le crédit aux entreprises et aux ménages. Prêts sans contrepartie et vite remboursés,
car les banques ont profité de ces prêts à faible taux d’intérêt pour spéculer à nouveau, d’où la réapparition des bonus versés aux traders (seule règle : ils sont gelés pendant trois ans)
et les gros profits bancaires. Seuls les Britanniques avaient nationalisé leurs banques pourries…
Les banques ont multiplié à l’infini les « produits dérivés ». Vasistas ? En premier lieu, c’est une technique d’assurance ; par exemple, vous vendez à terme un stock de blé à
un prix convenu à un acheteur prêt à prendre le risque d’une diminution de valeur du stock constitué. Votre capital, réel dans ce cas-là, est sauvé. Cet accord est le produit dérivé ; il est
cessible sur le marché financier ; le blé qui sert de garantie réelle (ou tout autre matière ou produit ou créance réelle ou titre financier comme les actions ou obligations, etc.) est
appelé le « sous-jacent ». Ensuite, c’est devenu de la spéculation pure à terme et à découvert. Les produits dérivés sont rapidement devenus des papiers (et surtout maintenant des
écritures électroniques circulant à la vitesse de la lumière) sans garantie objective comme les ABS, CDO, etc. Qui plus est, les échanges de dérivés se sont rapidement faits sur des marchés
inorganisés (sans surveillance publique ou de la corporation) dits de gré à gré (ou over the counter, par-dessus le comptoir) entre échangistes. Pour ce faire en toute discrétion, les
banques usèrent de filiales offshore dans des paradis fiscaux afin de développer l’évasion fiscale et surtout les activités hors-bilan de cette finance fantôme. On en est arrivé ainsi à une
pyramide dont la pointe servait de base en reposant sur les subprimes pour une très petite part (600 milliards, 4 % du PIB US), de 600 000 milliards de dollars alors que le PIB mondial n’est que
de 60 000 et le PIB US de 15 000. Cette pyramide, qui pourtant est imaginaire et n’offre aucune garantie objective, produit des engagements toxiques (et systémiques où tout le monde se tient par
la barbichette) à respecter sans que, évidemment, il y ait les liquidités nécessaires pour les honorer. D’où la débandade des banques avec la faillite de Lehmann Brothers en septembre 2008 :
personne ne savait ce qu’avaient les autres banques comme titres pourris, dès lors lesdites banques refusèrent de se faire crédit entre elles et coupèrent le crédit aux autres acteurs pour
refaire leurs ressources et actifs sûrs afin d’éviter la faillite.
Si les banques, les assureurs, les multinationales s’étaient mis à spéculer, c’est parce qu’il y avait une masse énorme de capitaux flottants à la recherche d’un placement (dont les dettes
publiques) et parce que les entreprises étaient en situation de surproduction à cause des moyens modernes et de la faiblesse du pouvoir d’achat, malgré l’inondation de produits low cost
en provenance de Chine et autres pays. Elles n’investissaient donc pas. Au contraire ; les entreprises rachetaient leurs propres titres pour en faire monter la valeur, notamment pour payer
des fusions par échange d’actions. Les PDG poussaient à ces manœuvres à cause de leurs stock-options (titre de la boîte vendable après cinq ans ; d’où l’idée d’en gonfler la plus-value). La
surproduction provient de ce que par l’accumulation des intérêts au fil du temps, le capital cherche sans cesse à entasser des moyens productifs de profit. Mais quand écouler la production
devient trop difficile, alors le capital s’accumule de façon purement financière pour le plus grand profit des organes de spéculation et, en outre, des fonds de pension par capitalisation. Au
passage, du capital productif est détruit par suite des fusions-acquisitions supprimant un concurrent et donnant lieu à des restructurations.
Il doit être clair que les pratiques des banques et autres financiers ont été tout simplement autorisées et facilitées par les législations et les fausses régulations décidées par les
politicards, y compris socialistes (les Fabius, DSK, Bérégovoy, etc.). Cela nous a conduits au pied du gouffre ; le capital ne va pas tarder à y tomber ; hélas avec nous. Il n’y a qu’à
regarder la situation de la Grèce (dette publique de 154 % du PIB), du Portugal et de l’Irlande… À qui le tour ? Rien d’étonnant : en réalité, par la pratique des portes tournantes
entre le public et le privé (le « pantouflage » en France), ce sont les banquiers qui dirigent la politique financière des USA, y compris avec Obama. Et en France, Tsarkowitch s’entoure
des précieux conseils du banquier Pébereau et les inspecteurs des finances pantouflent dans la banque…
Cela dit, la débâcle financière ne révèle que la surface des choses ; en profondeur, ce sont les énormes déséquilibres mondiaux qui en sont la cause : excédents commerciaux chinois
contre déficits américains (ou excédents allemands contre déficits européens des « cigales ») compensés en sens inverse par un flux de fric chinois (2800 milliards de dollars de
réserves dont 800 en bons du Trésor) et des PVD vers le Trésor US et l’Occident (ce devrait être l’inverse !), stagnation du pouvoir d’achat des salariés (malgré les achats low cost
venant de Chine et autres PVD) contre fortunes croissantes (en patrimoine immobilier et en titres financiers) et mal acquises des riches (poussés à spéculer car ne pouvant dépenser leur pactole),
poids de la finance (20 à 30 % du PIB britannique) infiniment supérieur à celui de l’investissement productif, valse des taux de change et des taux d’intérêt entre pays nourrissant des
spéculations, etc. Les G 8 et G 20, emmenés par Tartarin de Neuilly, n’ont rien prévu pour régler ces déséquilibres…
NB : il faut féliciter la France d’avoir donné aux banques les meilleurs concepteurs de produits structurés grâce à son excellence en mathématiques, en général et financière en particulier,
notamment via l’Université de Paris-Dauphine. Pour une fois que l’on est dans les meilleurs… C’est M. Tourre (de cochon) qui avait inventé un CDO particulièrement vicieux et fumeux que Goldman
Sachs a vendu à des spéculateurs ou investisseurs tout en jouant à la baisse contre ce produit miracle ! Ce qui a ruiné les clients, d’où le procès intenté à Tourre (de vice) aux États-Unis.